Signal d’alarme tiré par deux universitaires marocains :40% du P.I.B et 67% de l’emploi au Maroc proviennent de l’économie non observée.
Une étude produite par deux chercheurs de l’Université Ibn TofaÏL, Charif Dahabi Akachkach et Aziz Bensahbou aboutit à des conclusions alarmantes selon lesquelles l’économie, dite non observée, l’ENO, s’accapare une grande partie du tissu économique marocain. Cette constatation est d’autant plus préoccupante, que le Maroc, pays émergent aspire à occuper une place prépondérante sur la scène internationale tant par ses réalisations dans différents secteurs de l’économie, de la technologie et des énergies renouvelables, par son aura sportif international (demi-finaliste de la CDM au Qatar, co-organisateur de la CDM de 2030 aux côtés de l’Espagne et du Portugal), que par sa position acquise de hub aux portes de l’Afrique subsaharienne. Lire plus
L'économie
non observée, également appelée économie informelle ou souterraine, fait
référence à toutes les activités économiques qui ne sont pas officiellement
enregistrées ou rapportées aux autorités gouvernementales. Cette partie de
l'économie échappe souvent à la réglementation, à la taxation et à la
surveillance officielles.
L’ENO se
décline en plusieurs composants notamment, l'économie souterraine, l'économie
informelle, le travail au noir, la contrebande et le marché noir,
la production non déclarée, le capitalisme de connivence, la corruption, le
commerce illégal ; sexe, drogue, contrefaçon, mendicité, criminalité et la
liste est loin d’être exhaustive.
Les
incidences de l'économie non observée sur le tissu économique, fiscal et
sociétal peuvent être nombreuses :
En raison de
l'évasion fiscale, les recettes gouvernementales sont réduites, ce qui peut
compromettre la capacité du gouvernement à financer des services publics et des
infrastructures.
L’ENO peut créer des distorsions dans la
concurrence, car les entreprises opérant dans le secteur informel peuvent ne
pas être soumises aux mêmes règles que celles opérant dans l'économie formelle.
Les travailleurs informels peuvent être exclus des filets de la couverture
médicale, ce qui peut entraîner des problèmes de protection sociale et de
conditions de travail.
En fin de compte, l’ENO a pour effet pervers de rendre difficile l'obtention de données économiques précises, empêchant la formulation de politiques adéquates. Selon les auteurs de cette étude, "l'examen asymptomatique des caractéristiques et déterminants de l'ENO marocaine, menée dans le cadre de cet essai, nous offre plus de crédibilité à affirmer que le non-formel marocain est le résultat naturel d'un sentier de mal-développement entretenu politiquement par une kleptocratie, qui s'est montrée incapable de créer les conditions propices pour assurer la transition d'une économie de rente vers une vraie économie économie de marché"
Le diagnostic est, on ne peut plus clair. La défaillance en matière de gouvernance laisse une brèche béante dans le tissu économique dans laquelle s'engouffre l'informel. La croissance de l'ENO est le résultat logique de la structure politico-institutionnelle viciée. Structure qui force l'informel à combler les défaillance du formel.
Réduire
l'économie non observée nécessite souvent des réformes structurelles, des
incitations fiscales appropriées, et des efforts pour améliorer la conformité
réglementaire. Cependant, il est important de reconnaître que certaines
activités informelles peuvent également être une réponse à des lacunes dans
l'économie formelle, et une approche équilibrée est nécessaire pour traiter
cette question complexe.