
Cette technologie repose principalement sur des réseaux de neurones appelés autoencodeurs et GANs (Generative Adversarial Networks), qui permettent de superposer ou de recréer des visages, des voix ou des mouvements avec un réalisme troublant. Si le concept de manipulation d’image n’est pas nouveau, le deepfake marque une rupture en démocratisant des trucages jusqu’alors réservés aux studios professionnels.
La genèse du deepfake remonte à 2017, lorsqu’un utilisateur anonyme de Reddit, se faisant appeler "Deepfakes", a commencé à publier des vidéos de personnes nues, truquées avec les visages de célébrités comme Gal Gadot ou Scarlett Johansson. Ces vidéos, créées à l’aide d’un algorithme open source, ont rapidement attiré l’attention de la presse et du grand public. Ce premier usage problématique a propulsé le terme "deepfake" dans le langage courant et suscité des débats éthiques sur l'usage de l’IA à des fins de tromperie ou de harcèlement.
Au fil des années, les outils se sont perfectionnés et popularisés. Des applications comme Zao, Reface ou DeepFaceLab permettent désormais à presque n’importe qui de générer un deepfake en quelques minutes avec un smartphone. Dans une vidéo devenue virale en 2021, on pouvait voir l’acteur Tom Cruise jouer au golf, plaisanter et s’adresser à la caméra – sauf qu’il ne s’agissait pas de lui, mais d’un imitateur doublé d’un deepfake ultra-réaliste. Cette vidéo, postée par un expert en effets spéciaux, visait à sensibiliser le public à la facilité avec laquelle on pouvait manipuler la réalité.
Le deepfake a également touché le monde politique. En 2018, une vidéo truquée du président Obama circulait sur YouTube : on le voyait tenir des propos injurieux, en réalité générés par Jordan Peele, le réalisateur de Get Out, pour alerter sur les dangers du deepfake en matière de désinformation. D’autres exemples incluent des faux discours d’Emmanuel Macron ou de Volodymyr Zelensky, fabriqués pour semer la confusion dans des contextes de crise ou de guerre. Ces cas illustrent comment la technologie peut devenir une arme d’influence redoutable.
Face à ces dérives, plusieurs initiatives ont vu le jour pour détecter ou encadrer les deepfakes. Des entreprises comme Microsoft ont développé des outils de détection automatique, tandis que des gouvernements commencent à légiférer pour en limiter l’usage malveillant. En parallèle, des artistes et activistes détournent le deepfake à des fins pédagogiques, humoristiques ou artistiques. Le phénomène, bien qu’inquiétant, reste aussi le reflet de notre époque : fascinée par la technologie, mais en quête de vérité et d’authenticité.
Ainsi, l’histoire du deepfake est celle d’une technologie à double tranchant. Issue d’une avancée spectaculaire en intelligence artificielle, elle est rapidement devenue un terrain d’expérimentations aussi fascinantes qu’inquiétantes. Entre satire, escroquerie, manipulation et création artistique, le deepfake nous confronte à une question cruciale : dans un monde où l’on peut tout falsifier, comment reconnaître ce qui est vrai ?
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