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31 août 2025

BILLET : Je ne comprends plus les relations internationales- Par A. Laalioui

        ✍️Auteur :   A. Laalioui🗓️ Date :31/08/2025

Kaleidoscope 

Ces derniers mois, il devient difficile de lire et comprendre les relations internationales. Les repères qui guidaient l’analyse — la domination américaine, la force supposée du droit international, le filet protecteur de la mondialisation — semblent ne plus fonctionner comme avant.

Trente ans durant, on a cru qu’une crise majeure suivait presque toujours le même chemin : pression diplomatique, cessez-le-feu, négociations et reconstruction. Or, depuis quelques années, et plus encore depuis 2022, cet enchaînement n’est plus automatique. Le monde s’est fragmenté, les coalitions se forment au gré des intérêts et non plus autour d’un consensus universel, et les institutions internationales paraissent saturées par la multiplicité des crises.

La guerre en Ukraine illustre bien cette nouvelle donne. Loin de se diriger vers son dénouement, elle se transforme. Les lignes de front bougent lentement, la Russie poursuit une guerre d’attrition tandis que l’Ukraine multiplie les frappes profondes et cherche des soutiens diplomatiques dans un environnement où ses alliés sont parfois divisés. Les tentatives de cessez-le-feu s’enchaînent, suivies de ré-escalades rapides. La logique d’un compromis rapide, piloté par Washington ou l’Europe, ne s’impose plus : elle se heurte à des alliances mouvantes, à la montée en puissance d’autres pôles comme les BRICS+ et l’Organisation de coopération de Shanghai, et à un calendrier international dominé par les cycles électoraux et les livraisons d’armes.

À Gaza, la situation n’est pas plus lisible. Beaucoup pensaient que l’offensive israélienne s’était achevée, mais elle a simplement changé de forme. Les destructions massives ont été suivies de déplacements à grande échelle, et la question humanitaire reste brûlante. La Cour internationale de Justice a ordonné dès 2024 plusieurs mesures pour prévenir des violations graves du droit international, sans parvenir à stopper la spirale. Des zones fermées, des « villes humanitaires » et des plans de transfert de population sont rapportés par des organisations internationales et contestés par de nombreuses ONG. En parallèle, sur la scène diplomatique, une dynamique menée par la France et l’Arabie saoudite tente de faire avancer à l’ONU la reconnaissance d’un État palestinien. Paris s’est même engagé à franchir le pas dès septembre 2025. Mais cette initiative se heurte aux faits sur le terrain : la conquête et la mise sous contrôle de Gaza rendent tout projet d’État viable extrêmement difficile.

D’où ce sentiment de confusion : le droit international « avance » à New York tandis que la géographie « recule » à Gaza. Est-ce du chaos ou un changement de paradigme ? Sans doute un peu des deux. Le chaos tient à la superposition des crises et à l’embouteillage institutionnel ; le changement de paradigme tient à une évolution plus profonde : le monde devient multipolaire, les normes internationales sont constamment mises à l’épreuve, les sanctions redessinent des blocs plutôt qu’elles ne les dissolvent, la guerre de l’information brouille la lecture des événements, et la politique intérieure de chaque acteur — élections aux États-Unis, en Israël, en Europe, en Ukraine, dans les pays arabes — pèse directement sur les options de sortie de crise.

Face à cette complexité, il faut renouveler les outils de lecture. Plutôt que de chercher un récit linéaire, il s’agit d’observer qui contrôle la géographie, qui maîtrise le calendrier, quels leviers cachés sont mobilisés (finance, énergie, tribunaux, sanctions), quelles coalitions pèsent réellement, et surtout quel scénario de fin de guerre reste crédible, avec quelle gouvernance du « lendemain » et quelle compatibilité avec les normes internationales. Appliquée à l’Ukraine, cette grille révèle l’absence, pour l’instant, d’un alignement favorable à un cessez-le-feu durable. Appliquée à Gaza, elle met en évidence l’écart immense entre les ambitions diplomatiques et la réalité du terrain.

Ainsi, ce n’est pas notre capacité d’analyse qui faillit, c’est le monde qui change de mode de lecture. Les anciens schémas — unipolarité, droit comme pare-feu, processus de paix linéaire — ne suffisent plus. Il faut désormais penser les crises comme des processus fragmentés, où la diplomatie, la guerre et le droit avancent en parallèle, parfois dans des directions opposées.

 



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