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07 mai 2025

CHRONIQUE : À chaud ! – 9 mai à Moscou : parade ou poudrière ? Par A. Laalioui

Publié par A. Laalioui le 7/5/2025



À quarante-huit heures d’un événement qui s’annonçait cérémonial, le monde retient désormais son souffle.

Le traditionnel défilé militaire du 9 mai à Moscou, commémoration de la victoire soviétique sur le nazisme, s’apprête à se transformer en acte géopolitique majeur, où chaque geste, chaque présence, chaque silence résonne comme un choix de camp.

Cette année, la place Rouge est devenue la scène d’un affrontement symbolique mondial, à la fois visible et souterrain. Et au cœur de cette tension : une guerre toujours en cours en Ukraine, un Trump revenu à la Maison Blanche avec ses velléités assumées de rapprochement avec Vladimir Poutine, et une Europe déboussolée, prise entre ses principes et ses intérêts.

Depuis janvier 2025, Donald Trump, à nouveau président des États-Unis, ne cesse de brouiller les repères. Moins d’une semaine après son investiture, il annonçait la suspension de l’aide militaire à l’Ukraine, puis a laissé entendre que l’élargissement de l’OTAN serait “négociable”. Plus récemment, il a déclaré que la paix en Ukraine pourrait passer par “une nouvelle architecture sécuritaire avec la Russie”. Pour beaucoup, c’est un feu vert déguisé à Poutine, une réhabilitation diplomatique qui ne dit pas son nom.

Alors que Moscou s’affaire à parer son défilé du 9 mai d’un prestige renouvelé, les regards se tournent vers la Chine, dont la présence à Moscou a été confirmée il y a à peine 24 heures. Ce choix, lourd de sens, laisse entrevoir une alliance opportuniste sino-russe, renforcée par un contexte mondial en recomposition. Pékin n’ignore rien des ambitions américaines et joue sa carte avec doigté : s’afficher aux côtés de Moscou sans s’aliéner Washington, devenu plus imprévisible que jamais.

Mais la véritable surprise, c’est la confirmation que des contingents militaires venus de treize pays étrangers défileront également ce 9 mai sur la place Rouge. Outre la Chine, des soldats venus d’Asie centrale, d’Afrique, d’Amérique latine et même de certains États du Moyen-Orient participeront aux cérémonies. Une mise en scène de la multipolarité que la Russie veut imposer, avec une image de légitimité internationale soigneusement orchestrée, en rupture totale avec son isolement occidental.

Pour l’Ukraine, cette édition 2025 du défilé n’a rien d’un événement protocolaire. Elle est perçue comme une gifle, une tentative d’humiliation sur la scène mondiale. Le président Zelensky a averti : toute délégation étrangère présente à Moscou ce 9 mai sera considérée comme “ennemie de l’Ukraine”. Une formule forte, quasi martiale, qui donne le ton d’un ressentiment national désormais palpable.

Sur le plan militaire, Kiev se tient en alerte maximale. Des frappes symboliques contre des cibles russes à la périphérie de Moscou ne sont pas exclues. Des cyberattaques de grande ampleur sont également redoutées, tout comme des offensives de communication pour perturber le déroulement de la parade. Le message ukrainien est clair : il n’y aura pas de "pause protocolaire" pour le 9 mai.

Pendant ce temps, les capitales européennes balancent entre gêne, peur et paralysie. Si la plupart ont refusé l’invitation russe, certaines voix à Rome, Budapest ou Belgrade murmurent déjà que "l’ère Trump impose de revoir nos priorités". L’unité occidentale vacille, ébranlée par l’absence de leadership américain clair et par les tensions internes au sein de l’Union européenne.

Le 9 mai 2025 risque donc de ne pas seulement marquer un anniversaire. Il pourrait bien devenir le marqueur d’une nouvelle fracture mondiale. Entre ceux qui soutiennent activement ou tacitement Moscou, ceux qui persistent à défendre l’Ukraine à bout de souffle, et ceux, de plus en plus nombreux, qui choisissent de regarder ailleurs.

Le suspense est total. Ce qui devait être un rituel militaire pourrait se transformer en épisode de rupture. Un incident. Une attaque. Une défection. Un discours trop provocant. Une image de trop. Tout est possible.

Le monde entier a les yeux rivés sur Moscou. Et pour la première fois depuis longtemps, la peur n’est pas tant dans les armes que dans ce qu’elles symbolisent.

À chaud, l’Histoire ne se commémore plus : elle s’écrit, en direct, à la frontière de l’imprévisible.

 


 

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