
La
transition progressive d’un Internet centralisé (Web2) vers un Internet
décentralisé (Web3) bouleverse profondément la manière dont les données
personnelles sont collectées, stockées et exploitées.
Le Web3 s'appuie principalement sur des technologies comme la blockchain, les contrats intelligents et les identités numériques auto-souveraines (self-sovereign identities – SSI). Contrairement aux modèles traditionnels où les données sont hébergées sur des serveurs privés appartenant à des entreprises, les informations personnelles dans le Web3 peuvent être chiffrées, fractionnées et stockées sur des réseaux distribués. Cela rend leur accès beaucoup plus sécurisé et transparent, puisque chaque action est enregistrée de manière immuable sur la blockchain.
L’une des principales promesses du Web3 est l’autonomie des utilisateurs sur leurs données. Grâce aux portefeuilles numériques et aux identités décentralisées, chaque individu peut choisir précisément quelles informations il souhaite partager, avec qui et dans quelles conditions. Par exemple, un utilisateur peut prouver qu’il a plus de 18 ans sans révéler sa date de naissance, en utilisant des systèmes de "preuves à divulgation nulle de connaissance" (zero-knowledge proofs). Ce niveau de granularité dans le contrôle des données est inédit dans l’histoire de l’Internet.
Cependant, ce nouveau paradigme n’est pas sans défis. La responsabilisation des utilisateurs implique une meilleure éducation numérique, car perdre l’accès à une clé privée dans un système décentralisé peut signifier la perte irrémédiable de son identité ou de ses actifs. De plus, l’absence d’un acteur central rend plus complexe la gestion des litiges ou des erreurs, notamment en cas de mauvaise manipulation ou de piratage. Cela suppose aussi la mise en place de standards d’interopérabilité et de gouvernance pour assurer une adoption à grande échelle.
Par ailleurs, les cadres juridiques actuels, comme le RGPD en Europe, doivent évoluer pour s’adapter aux particularités du Web3. Alors que le droit à l’effacement des données est un principe fondamental du RGPD, il devient difficilement applicable dans une blockchain, où les informations sont conçues pour être immuables. Cela soulève la question de la compatibilité entre les exigences de protection des données et les caractéristiques techniques des réseaux décentralisés, nécessitant des ajustements réglementaires et technologiques.
Enfin, la gestion des données personnelles dans le Web3 ouvre de nouvelles perspectives économiques. Les utilisateurs peuvent potentiellement monétiser leurs données ou décider de les partager de manière conditionnelle via des contrats intelligents. Cela redistribue les pouvoirs économiques, jusque-là concentrés entre les mains de quelques plateformes, vers les individus. Ce renversement de logique contribue à redéfinir les équilibres de l’économie numérique en plaçant la confiance et la transparence au cœur des échanges.
En somme, le Web3 introduit un changement de paradigme profond dans la gestion des données personnelles, remettant l’individu au centre de l’écosystème numérique. Si les promesses sont nombreuses en matière de sécurité, d’autonomie et de transparence, la transition vers ce nouveau modèle devra surmonter des défis technologiques, éducatifs et réglementaires pour tenir pleinement ses promesses.
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