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16 juillet 2025

INTERNATIONAL : Russie-Chine : une alliance à l’épreuve de la géopolitique américaine- Par G. Amidot

        ✍️Auteur : G. Amidot  🗓️ Date :16/07/2025

Kaleidoscope 

Lors de son retour à la Maison-Blanche en novembre 2025, Donald Trump pensait rejouer une vieille partition géopolitique : diviser pour régner.

Fort de ses idées transactionnelles et de son mépris affiché pour la diplomatie multilatérale, il espérait rompre l’axe Pékin-Moscou, persuadé que l’alliance sino-russe n’était qu’un mariage de circonstance. Pourtant, les faits lui donnent tort. Non seulement cette alliance persiste, mais elle se consolide, affichant des signes de coopération stratégique de plus en plus explicites, malgré les pressions occidentales et les calculs erronés de Washington.

Contrairement à une alliance idéologique, celle qui unit la Russie et la Chine repose sur un socle solide d’intérêts géopolitiques, économiques et militaires. Les deux puissances partagent un même rejet de l’hégémonie américaine et une volonté affirmée de remodeler l’ordre international selon des principes multipolaires. La Russie apporte son poids militaire, ses ressources énergétiques et son expérience stratégique ; la Chine, quant à elle, incarne la puissance industrielle et technologique montante, capable de concurrencer les États-Unis sur tous les fronts.

Cette convergence n’est pas nouvelle. Depuis 2001, le traité de bon voisinage et de coopération amicale scelle des relations bilatérales apaisées. Mais c’est surtout après l’annexion de la Crimée en 2014 et les sanctions occidentales que Moscou s’est tournée plus résolument vers Pékin. La guerre en Ukraine n’a fait qu’accélérer cette dynamique : la Chine se pose en partenaire commercial incontournable de la Russie, tout en gardant une posture diplomatique prudente sur le conflit.

Plusieurs faits récents confirment la solidité du partenariat sino-russe. Les échanges commerciaux ont atteint des sommets historiques : plus de 240 milliards de dollars en 2024, avec une augmentation significative des paiements en yuans et en roubles, contournant ainsi le dollar. La Russie fournit du pétrole, du gaz, du charbon et du blé, tandis que la Chine exporte des composants électroniques, des machines-outils et des véhicules électriques.

Militairement, les exercices conjoints se multiplient, notamment dans le Pacifique, en mer du Japon ou en Asie centrale. Moscou et Pékin se coordonnent aussi dans l’espace numérique, défendant une vision autoritaire et souverainiste de l’Internet face aux standards occidentaux. Dans les institutions internationales, ils affichent un front commun au Conseil de sécurité de l’ONU ou dans les réunions des BRICS, où ils s’opposent à la domination occidentale.

L’alliance russo-chinoise ne se limite pas à des intérêts bilatéraux. Elle s’exprime dans des cadres multilatéraux comme les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud), récemment élargis à d'autres puissances émergentes. Pékin et Moscou y défendent une réforme des institutions mondiales, un nouvel ordre économique fondé sur des monnaies alternatives au dollar, et un agenda de développement propre aux pays du Sud global.

L’adhésion croissante de pays africains, arabes et latino-américains aux BRICS renforce l’influence du tandem sino-russe. Cette dynamique échappe totalement à Donald Trump, dont les positions isolationnistes et méprisantes à l’égard des alliés traditionnels fragilisent l’axe transatlantique sans pour autant affaiblir l’Eurasie.

À moyen et long terme, les conflits en Ukraine et à Taïwan cristallisent les lignes de fracture entre les blocs. En Ukraine, la Chine refuse de condamner la Russie, tout en appelant au dialogue. Son plan de paix proposé en 2023, bien que peu concret, a confirmé son rôle d’acteur diplomatique global. Quant à la Russie, elle bénéficie d’un soutien économique vital de Pékin pour résister aux sanctions.

À Taïwan, Moscou soutient de façon indirecte la politique chinoise de réunification. Les déclarations officielles du Kremlin appuient la "souveraineté" de la Chine sur l’île. En retour, Pékin soutient les justifications russes en Ukraine, dans un jeu de miroir habilement orchestré. Ces deux dossiers sont surveillés par les deux capitales comme des tests de la résistance occidentale et de la solidité de leur alliance.

En fin de compte, Donald Trump, en amateur de la géopolitique, a sous-estimé la cohérence stratégique de la relation sino-russe. Pensant pouvoir détacher la Russie d’un "bloc communiste" imaginaire, il n’a fait qu’encourager un resserrement des liens entre Moscou et Pékin. Son approche fondée sur des calculs à court terme et des impulsions idéologiques contraste avec la patience tactique des dirigeants chinois et russes, soucieux de construire une alternative durable à l’unilatéralisme américain.

La guerre en Ukraine, la tension en mer de Chine, l’expansion des BRICS et le rejet croissant de l’ordre mondial dominé par Washington annoncent une recomposition à long terme. Dans ce monde nouveau, la Russie et la Chine n’avancent pas côte à côte par accident, mais bien par choix stratégique. Et cela, Donald Trump ne l’avait pas vu venir.

 





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