Chaque mois de septembre, le monde semble reprendre sa
respiration avant de replonger dans le tourbillon des urgences. États, peuples,
institutions et individus réenclenchent la mécanique des impératifs propres :
rentrée administrative, scolaire, politique. Chacun semble affairé à ses
propres priorités, sans toujours percevoir le vaste mouvement collectif qui
s’opère en arrière-plan.
Les événements de cette rentrée en sont l’illustration. En France, dans certains quartiers défavorisés, des trafiquants de drogue organisent des kermesses pour distribuer des fournitures scolaires et des repas aux familles dans le besoin. Scènes baroques, à la fois choquantes et révélatrices : elles témoignent d’un effacement relatif des autorités établies et de la montée d’une forme de para-sociabilité opportuniste, où l’illégal se grime en bienfaiteur.
Pendant ce temps, au Proche-Orient, Israël mobilise 60 000 réservistes pour l’occupation de Gaza, sans qu’aucune force internationale crédible ne semble en mesure d’endiguer le processus. Le monde observe, commente, s’indigne parfois, mais s’accommode. La rentrée internationale obéit à ses propres logiques, où la force prime encore souvent sur la diplomatie, et où les urgences humanitaires peinent à trouver leur écho.
Sur un autre théâtre, celui des équilibres globaux, la confrontation larvée entre Trump et Poutine dessine une rentrée géopolitique singulière. L’un gesticule, multipliant déclarations et initiatives désordonnées ; l’autre consolide sa stature internationale en se positionnant comme contrepoids anti-américain. Ce jeu de miroir, qui mêle provocations et calculs froids, donne le ton : chacun s’affaire à sa manière pour renforcer sa position avant l’hiver stratégique qui vient.
Faut-il voir dans ce morcellement d’agendas et cette juxtaposition d’urgences une fatalité ? Peut-être. Le monde de septembre n’a jamais été celui des visions d’ensemble : il est celui des bilans à clore, des budgets à relancer, des alliances à recoudre. Chacun agit selon ses besoins pressants, quitte à sacrifier la cohérence globale au profit du court terme.
Mais cette fragmentation permanente n’est pas sans risque. À force de traiter l’urgence sans penser la trajectoire, on crée les conditions d’une instabilité chronique : celle où les grands événements se réduisent à des successions de faits, sans cap commun. La rentrée de septembre, loin d’être anodine, devient alors chaque année le révélateur d’un monde qui fonctionne par à-coups, par réflexes, plus que par vision.
Reste à savoir si ce mouvement est inéluctable, ou si, dans les interstices de ces urgences multiples, peut naître un projet global, un souffle commun. La rentrée n’est-elle pas aussi, parfois, le moment de repartir autrement ?
SUIVEZ-NOUS SUR ▼▼

www.kaleidoscope.ma
pour avoir accès à nos nombreuses rubriques,
à tous nos articles et à toutes nos pages.