Depuis leur élargissement amorcé lors du sommet de Johannesburg
en 2023, les BRICS ont entamé une transformation profonde qui redessine leur
positionnement international.
Sur le plan économique, cette nouvelle configuration confère au groupe un poids renforcé dans les secteurs stratégiques de l’énergie, de l’agriculture, des métaux critiques et des marchés de consommation émergents. En parité de pouvoir d’achat, la part des BRICS élargis dans l’économie mondiale s’accroît rapidement, portée par la croissance démographique et par l’essor des corridors logistiques reliant l’Asie au Moyen-Orient. En valeur nominale, l’écart avec le G7 demeure notable, mais la dynamique tend à se resserrer au fil des années.
Dans le domaine monétaire, les BRICS misent sur une approche progressive de la dé-dollarisation sans chercher, à ce stade, à instaurer une monnaie unique. Les échanges en devises locales se multiplient, les banques centrales renforcent leurs réserves en or et des projets d’infrastructures de paiement alternatifs, comme BRICS Pay basé sur la blockchain, sont développés. L’objectif est de réduire la dépendance au dollar et de se prémunir contre les risques liés aux sanctions occidentales, tout en offrant de nouvelles marges de négociation aux économies émergentes.
Cette dynamique s’accompagne cependant de tensions internes et de limites structurelles. L’élargissement rend le groupe plus représentatif du « Sud global » mais aussi plus hétérogène. Les intérêts de sécurité de l’Inde et de la Chine divergent, les monarchies du Golfe tentent de préserver leur équilibre entre l’Occident et l’Asie, et l’Iran voit dans ce cadre une opportunité de soutien diplomatique. Le format adopté, combinant membres et partenaires, permet néanmoins d’avancer par projets ciblés dans des domaines comme les infrastructures, le climat ou le numérique, tout en préservant une certaine flexibilité dans la prise de décision.
Face au G7, les BRICS élargis n’apparaissent pas comme une alternative monolithique mais plutôt comme un multiplicateur d’options stratégiques. Ils sont désormais capables d’influencer certains standards de paiement, de renforcer les chaînes d’approvisionnement régionales et de peser davantage dans les forums internationaux, mais leur capacité à agir comme un bloc unifié reste limitée par l’absence d’intégration financière approfondie et par des rivalités persistantes.
L’avenir de ce contre-pouvoir dépendra de sa capacité à traduire ses ambitions en réalisations concrètes. Les prochaines années seront décisives pour intensifier les paiements en monnaies locales, financer des corridors énergétiques et numériques, renforcer les marchés communs et gérer les divergences internes sans paralyser l’agenda collectif. Si ces conditions sont réunies, les BRICS ne remplaceront pas le G7, mais ils contribueront à installer durablement un nouvel équilibre multipolaire où deux pôles économiques et normatifs coexisteront et se répondront.
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