La lutte contre la fraude financière et le blanchiment d’argent connaît une transformation majeure depuis 2024 grâce à l’émergence de coalitions public-privé et à l’intégration de nouvelles pratiques d’enquête dites "on-chain"*.
L’un des moteurs de ce succès réside dans la capacité des acteurs publics et privés à partager leurs données en temps quasi réel. Là où autrefois les enquêtes reposaient sur des échanges lents et cloisonnés, les nouvelles structures de collaboration favorisent l’interopérabilité et l’analyse collective. Les banques signalent plus rapidement les transactions suspectes, les plateformes blockchain fournissent des alertes sur les mouvements d’actifs, et les autorités judiciaires peuvent réagir avec une célérité inédite. Cette synergie a considérablement réduit les fenêtres d’opportunité pour les fraudeurs.
L’autre avancée majeure est l’utilisation croissante des enquêtes on-chain. Ces méthodes exploitent la transparence intrinsèque des blockchains pour retracer les flux financiers, identifier les portefeuilles suspects et lier des adresses pseudonymes à des réseaux criminels. En 2024-2025, des outils d’analyse avancée et d’intelligence artificielle ont permis non seulement de cartographier des écosystèmes entiers de blanchiment mais aussi de les neutraliser en amont, avant leur conversion en actifs fiduciaires.
Cependant, ces progrès soulèvent également des enjeux en matière de protection de la vie privée et de gouvernance des données. Le partage accru d’informations entre secteurs public et privé doit respecter les cadres légaux sur la confidentialité et le respect des droits individuels. Des débats persistent sur la portée des gel d’actifs sans décision judiciaire préalable, et sur la possibilité d’erreurs d’attribution dans des enquêtes blockchain où l’identité réelle n’est pas toujours immédiatement vérifiable.
Sur le plan économique et géopolitique, l’impact est double. D’une part, le renforcement de la lutte anti-fraude améliore la réputation des marchés financiers et crypto, rendant ces derniers plus attractifs pour les investisseurs institutionnels. D’autre part, il accroît la pression sur les juridictions laxistes et les plateformes offshore, accélérant une forme de standardisation internationale des pratiques de lutte contre la fraude et le blanchiment. Cela contribue à réduire l’arbitrage réglementaire et les zones grises qui profitaient jusqu’ici aux criminels financiers.
À l’avenir, ces coalitions devraient s’étendre et intégrer davantage d’acteurs non bancaires : sociétés de paiement, places de marché NFT, protocoles DeFi, voire réseaux sociaux monétisés. Les enquêtes on-chain pourraient aussi évoluer vers une approche proactive basée sur l’IA prédictive, capable de détecter des schémas frauduleux émergents avant même qu’ils ne causent un préjudice significatif. Le défi sera alors de concilier cette efficacité renforcée avec des garanties de transparence et de recours pour les entités faussement incriminées.
La période 2024-2025 constitue probablement une phase de transition vers une ère où la lutte anti-blanchiment ne sera plus seulement réactive, mais préventive et systémique. L’enjeu pour les années à venir sera de consolider la confiance entre les parties prenantes, d’harmoniser les réglementations internationales et de démocratiser l’accès aux outils d’analyse on-chain, afin que la lutte contre la criminalité financière ne devienne pas le monopole de quelques acteurs dominants mais un effort collectif et équilibré.
* analyse des données publiques disponibles sur une blockchain (comme les transactions, les mouvements de cryptomonnaies et l'activité des portefeuilles) afin de retracer le chemin des fonds, comprendre le comportement des acteurs, et potentiellement identifier les auteurs d'escroqueries ou d'activités illicites sur la blockchain
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