En ce début d’année administrative, une brume épaisse semble envelopper l’actualité internationale. Les grands dossiers géopolitiques paraissent figés dans une zone grise où les certitudes sont rares et les récits souvent brouillés.
Dans la bande de Gaza, la situation est tout aussi déroutante. Derrière les ruines d’une guerre dévastatrice, circulent des rumeurs persistantes de projets israéliens visant à redessiner l’enclave palestinienne. On évoque la construction d’une zone côtière transformée en « ville intelligente » et en « riviera », appuyée par un financement américain qui s’accompagnerait d’incitations financières individuelles pour les habitants palestiniens. Si de tels projets relèvent encore de la spéculation plus que d’un plan officiel, leur évocation alimente un sentiment de dépossession programmée et de recomposition démographique sous couvert de modernisation.
Au Sahel, le brouillard est tout aussi dense, mais la dynamique est différente. Depuis la recomposition des alliances régionales et le retrait progressif des forces occidentales, l’Algérie cherche à réaffirmer son rôle de puissance pivot. Elle met en avant son engagement dans la lutte antiterroriste, mais ses voisins l’accusent, ouvertement ou en coulisses, d’avoir contribué à entretenir l’instabilité dans cette zone stratégique. Derrière ce bras de fer se joue la redéfinition des routes commerciales, des influences militaires et des sphères d’influence énergétique, dans un contexte où la Russie, la Chine, la Turquie et d’autres acteurs avancent leurs pions.
Ce brouillard n’est pas seulement le fruit de l’incertitude, mais aussi celui d’une information morcelée, filtrée, parfois instrumentalisée. Chaque acteur, qu’il soit étatique ou non, cherche à imposer son récit pour façonner la perception internationale et préparer le terrain à ses projets. Les zones de silence, les rumeurs amplifiées et les « fuites » calculées deviennent des armes à part entière dans la bataille des narrations.
Pour lever ce brouillard, il faut donc accepter l’inconfort de l’incomplétude : croiser les sources, identifier les intérêts en jeu et distinguer ce qui relève des faits de ce qui n’est qu’annonce ou intoxication. En Ukraine, la paix ne viendra sans doute que d’un épuisement réciproque et de compromis imposés. À Gaza, le véritable enjeu reste celui de la souveraineté et du droit au retour, bien plus que la promesse d’une ville high-tech. Au Sahel, la recomposition géopolitique sera longue, et l’Algérie ne peut prétendre remodeler la région sans se confronter aux résistances locales et aux ambitions extérieures.
Le brouillard informationnel, en définitive, n’est pas une fatalité : il est le symptôme d’une transition mondiale où les rapports de force se redéfinissent, les certitudes anciennes s’effritent et les récits officiels ne suffisent plus à masquer les jeux de pouvoir réels.
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