À LA UNE
SUIVEZ-NOUS SUR Suivez-nous

10 novembre 2024

BILLET : Le déclin de l’Occident ; signes avant-coureurs- Par Gali Amidot

L’évolution géopolitique de la dernière décennie illustre l’émergence d’un monde multipolaire où la domination des puissances occidentales, autrefois incontestée, s’érode progressivement face à l’ascension de nouveaux acteurs comme la Chine, la Russie, l’Inde, et plus largement, le bloc des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud). Les relations internationales se reconfigurent ainsi autour de nouveaux pôles d’influence, redistribuant le pouvoir global de manière inédite. Lire plus

Les sociétés des pays occidentaux s’érodent inexorablement. Un des signes visibles de ce déclin occidental réside dans des phénomènes internes qui fragilisent la cohésion de ces sociétés. La dénatalité, particulièrement marquée en Europe, engendre des inquiétudes pour l’avenir économique et démographique du continent, où le vieillissement de la population menace la durabilité des systèmes sociaux. Par ailleurs, les libertés individuelles, jadis symboles de progrès, se transforment parfois en excès de libéralisme des mœurs, provoquant des tensions culturelles et un manque de consensus social. Cette situation est exacerbée par la montée des populismes, qui exploitent les frustrations économiques et identitaires. Des puissances comme la Russie et la Chine n'hésitent d’ailleurs pas à en tirer parti, cherchant à saper l'unité occidentale en soutenant des mouvements antisystème ou en manipulant l’opinion publique via des campagnes d’information ciblées. De plus, l’extrême fragmentation des opinions rend les sociétés occidentales vulnérables à la polarisation, limitant leur capacité à forger une vision commune face aux défis globaux. Loin d'être anodins, ces facteurs s’inscrivent dans une dynamique qui pourrait accélérer le recul de l’influence occidentale sur la scène mondiale.

Au cours des dix dernières années, les BRICS ont solidifié leur présence, offrant une alternative au modèle occidental de gouvernance économique et politique. La Chine, en particulier, a avancé ses ambitions mondiales avec des projets massifs comme la « Nouvelle Route de la Soie », visant à créer un vaste réseau d’infrastructures reliant l’Asie, l’Afrique et l’Europe. La Chine s’affirme aujourd’hui comme un pôle économique majeur et une puissance militaire de plus en plus affirmée. Parallèlement, l’Inde, avec son économie dynamique et une population jeune, est un autre acteur clé qui étend son influence en Asie du Sud et cherche à renforcer ses alliances dans le cadre d'un équilibre entre la Chine et l’Occident.

Ces puissances en croissance redéfinissent les institutions mondiales : le bloc des BRICS a formé sa propre banque de développement, la New Development Bank, en réponse aux institutions dominées par l’Occident comme le FMI et la Banque mondiale. Ce pivot vers des institutions alternatives traduit la volonté des BRICS de s’émanciper des règles imposées par l’Occident et d’instaurer un système plus multipolaire.

En parallèle, la Russie, sous la présidence de Vladimir Poutine, s'est fermement opposée aux valeurs et aux intérêts occidentaux. L’annexion de la Crimée en 2014, suivie de l’invasion de l’Ukraine en 2022, représente un acte de défi sans précédent à l'égard de l'Occident et, plus largement, de l'ordre mondial post-Guerre froide. En agissant ainsi, la Russie force l'Europe et les États-Unis à reconsidérer leur sécurité collective et démontre les limites de la dissuasion occidentale.

Cette crise a révélé les vulnérabilités de l’Occident, notamment en matière de dépendance énergétique envers la Russie, exposant l’insuffisance de ses préparations en cas de tensions prolongées. Ce conflit pourrait d'ailleurs servir de catalyseur à la réorientation de l'Europe vers des alternatives énergétiques, accélérant ainsi la transition vers les énergies renouvelables, mais laissant pour l’instant les pays occidentaux face à des défis importants.

L’évolution des relations internationales a poussé de nombreux analystes à questionner la solidité et la pérennité de l’hégémonie occidentale. La réponse parfois fragmentée de l’Europe face aux crises et la montée de l’isolationnisme aux États-Unis remettent en question la stabilité du leadership occidental. L’hypothèse d’un éventuel retour de Donald Trump à la présidence en 2025 pourrait intensifier ce retrait : Trump avait déjà montré lors de son premier mandat un net penchant pour des politiques isolationnistes, marquées par la volonté de « rendre l’Amérique à nouveau grande » en se désengageant de ses alliances multilatérales et en réduisant les responsabilités américaines à l’étranger.

Avec la réélection de Trump, les États-Unis pourraient encore s'éloigner des alliances transatlantiques, laissant un vide que la Chine, la Russie et d'autres puissances émergentes pourraient exploiter. Ce scénario soulève des interrogations : un retour de Trump pourrait affaiblir davantage les structures de coopération occidentales comme l’OTAN, tout en nourrissant les ambitions des puissances émergentes qui défient déjà activement l’Occident.

L’ordre mondial actuel se transforme, et un éventuel affaiblissement de l’Occident semble de plus en plus plausible, surtout si les États-Unis tournent le dos à leurs alliances et à leur rôle de puissance stabilisatrice. Les BRICS et leurs alliés pourraient en profiter pour s’affirmer davantage, créant un équilibre où plusieurs puissances coexistent, chacune avec ses propres sphères d'influence et idéologies.

Dans ce contexte, l’Europe devra probablement se renforcer de manière autonome pour faire face aux défis géopolitiques et économiques, tout en conservant des liens avec les États-Unis. La montée d’un monde multipolaire pourrait finalement aboutir à une stabilité mondiale accrue, mais dans un système moins centralisé, où les intérêts divergent davantage.

Ce paysage, en constante mutation, posera des défis uniques mais pourrait aussi offrir des opportunités pour les puissances émergentes de façonner un ordre mondial plus équilibré et diversifié. Toutefois, la question  demeure : l’Occident saura-t-il s’adapter ou, au contraire, continuera-t-il à s'affaiblir face à la montée des BRICS et des alternatives multipolaires ?

Abonnez-vous 👍