
Le Haut-Commissariat au Plan (HCP) a publié son rapport annuel intitulé "Situation économique nationale en 2024", qui dresse un tableau nuancé de la conjoncture économique du Maroc.
En effet, la croissance a été principalement portée par les activités non agricoles, dont la valeur ajoutée a progressé de 4,5 %. À l’inverse, le secteur agricole a subi une contraction marquée de 5,2 %, conséquence directe des conditions climatiques défavorables et du stress hydrique chronique. La valeur ajoutée globale du secteur primaire (agriculture et pêche) a reculé de 4,1 %. Ce recul de la part de l’agriculture dans le PIB, bien que révélateur d’une fragilité conjoncturelle, peut aussi être interprété comme un signe positif d’évolution vers une économie moins dépendante des ressources naturelles surexploitées.
Cette tendance s’inscrit dans un contexte de réorientation de la production agricole vers le marché intérieur. Le modèle basé sur l’exportation de produits agricoles – notamment vers l’Union européenne – a montré ses limites, tant du point de vue écologique qu’économique. Les cultures intensives, souvent destinées à l’export, épuisent les nappes phréatiques et exacerbent les tensions sur les ressources hydriques. La baisse relative de la contribution de l’agriculture dans la création de richesse nationale apparaît dès lors comme un levier potentiel de résilience, permettant de limiter l'impact de la sécheresse tout en consolidant la sécurité alimentaire intérieure.
Parallèlement, le rapport du HCP met en lumière une forte progression de l’investissement brut, qui a connu une hausse de 13,5 %, atteignant 30,7 % du PIB. Cette dynamique est en grande partie alimentée par les investissements étrangers, notamment ceux en provenance de l’Union européenne. Toutefois, ces flux d’investissement ne sont pas dénués de risques. Une part significative est orientée vers des secteurs sensibles comme l’énergie et l’agriculture, avec des effets potentiellement néfastes sur les écosystèmes locaux et la souveraineté des ressources.
Ces constats soulèvent une question cruciale : comment concilier attractivité économique et durabilité environnementale ? Il devient urgent de conditionner les investissements étrangers à des normes strictes en matière de gestion des ressources et de responsabilité sociale. Le Maroc ne peut plus se permettre un modèle de croissance basé sur l’épuisement de son capital naturel, sous prétexte de modernisation économique.
En conclusion, le ralentissement du secteur agricole en 2024, loin d’être une simple contre-performance, s’inscrit dans une dynamique de transformation structurelle. Le Maroc semble amorcer une sortie progressive du modèle agricole extensif, pour se tourner vers une économie plus diversifiée, moins vulnérable aux chocs climatiques, et davantage orientée vers la satisfaction des besoins internes. Cette mutation devra cependant s’accompagner d’une gouvernance rigoureuse des investissements, afin que la croissance future soit non seulement soutenue, mais surtout durable.
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